Pédophile un jour, pédophile toujours ?
Walter Albardier, médecin psychiatre au Centre Ressources pour Intervenants auprès d’Auteurs de Violences Sexuelles Ile-de-France (CeRIAVSIF) :
Certaines personnes disent « Pédophile un jour, pédophile toujours », je ne valide pas. Je ne suis pas d’accord. Et je ne suis pas d’accord d’abord parce que j’ai déjà rencontré des gens qui avaient changé de sexualité, par un travail psycho-thérapeutique, en l’occurrence, quelqu’un qui était même passé à l’acte, et qui avait pu, finalement, être beaucoup moins envahi, voire plus du tout envahi, par ce type de sexualité, pour se diriger vers d’autres types de sexualités. Il n’y a pas de technique, pas de ressort, qui nous permette d’envisager de faire sortir quelqu’un de la pédophilie, ça ne marche pas comme ça ; pour autant on ne peut pas considérer que les choses sont définitivement figées. Certaines personnes, avec un certain travail, avec un retour sur leur vécu, sur leur histoire, et puis avec aussi un travail pour éviter d’entretenir parfois certains fantasmes, etc., peuvent se séparer peu à peu de cette symptomatologie, qui est pénible.
Est-ce qu’il y a un âge où ce n’est plus possible, de faire disparaître ces pulsions pédophiles ?
Le lendemain de la mort !
Donc non ? Il n’y a pas d’âge où on se dit « c’est trop tard » ?
Il n’est jamais trop tard pour se faire aider quand on est dépassé. Alors je ne dis pas que les prises en charge vont faire disparaître 100 % des symptômes des gens qui présentent une pédophilie. Ce n’est pas ça la question. La question c’est de se faire aider par rapport à ce dans quoi on est pris. Là, il n’y a pas d’âge limite, c’est-à-dire que même si ça fait très longtemps qu’on est pris par cela, si on est plus fortement envahi à un moment, il est bien d’aller se faire aider.
Cécile Miele, psychologue et sexologue au Centre Ressources pour Intervenants auprès d’Auteurs de Violences Sexuelles (CRIAVS) Auvergne et au CHU de Clermont-Ferrand :
Je crois que la vie, les expériences, font que le fantasme va se nourrir d’autre chose, qu’on va avoir d’autres besoins, qu’on va aussi s’autoriser aussi peut-être à explorer d’autres univers.
C’est-à-dire aussi que ça va évoluer ?
Ça va évoluer, exactement. Il faut savoir que le fantasme il échappe au conscient, il échappe à la volonté, d’une certaine manière. Donc le fantasme il va évoluer parce que la personne évolue, parce qu’elle va ouvrir d’autres portes, parce que peut-être qu’elle va se dire qu’en effet elle a une attirance pour les enfants, mais peut-être qu’elle peut aussi avoir une attirance pour d’autres objets ? Et il n’est pas rare justement que les personnes pédophiles ne soient pas exclusivement pédophiles. On va aussi pouvoir travailler sur l’image pédophilique, c’est-à-dire : « Est-ce que vous avez vraiment une attirance pour l’enfant ou est-ce que vous avez une attirance pour une femme qui n’a pas trop de poitrine par exemple, qui est épilée ? » Donc on peut faire évoluer un peu ces fantasmes-là, en ouvrant les portes. En explorant d’autres univers.
L’intégralité de chacun de ces entretiens est disponible gratuitement sur notre site internet et sur notre chaîne YouTube.