Premières règles : premiers rapports sexuels ?
Ève Pilyser, psychologue clinicienne, psychanalyste jungienne, membre de la Société Française de Psychologie Analytique et de l’Association de Psychanalystes et Psychothérapeutes Jungiens :
Est-ce l’arrivée des premières règles chez une fille signifie qu’elle est devenue adulte ? Qu’elle peut avoir sans aucune conséquence psychique des relations sexuelles avec un adolescent ou un adulte ? Qu’elle est prête à avoir un enfant sans qu’il n’y ait aucun risque, aucun impact ?
Mon Dieu, non. L’arrivée des règles signe simplement que son corps est capable d’enfanter. C’est tout. D’ailleurs dire à une jeune fille qui devient pubère – y compris dans nos sociétés – : « tu es une femme maintenant »…
C’est problématique ?
C’est beaucoup trop, c’est perturbant. Non, elle n’en est pas là du tout ! Son corps démarre une nouvelle phase de son évolution qui va lui permettre, au cours des années qui viennent, et c’est toute l’adolescence, d’évoluer et de passer de l’état d’enfant à celui de femme. C’est un processus. C’est ce mot-là : « un processus ». C’est-à-dire que ça intègre une temporalité à respecter. Ce n’est pas magique. Ce n’est pas instantané et c’est violent de le percevoir comme tel, et de le renvoyer comme tel à l’enfant.
Ça demande du temps ?
Voilà, c’est un processus évolutif. Donc bien sûr, son corps peut faire un enfant, mais elle n’en est pas du tout là.
Patrick Blachère, expert psychiatre, sexologue, vice-président de l’Association Interdisciplinaire post Universitaire de Sexolologie (AIUS) :
Lorsqu’un enfant est capable d’avoir une sexualité même reproductive, parce-qu’il a une érection, parce-qu’il a une éjaculation, ou parce-qu’une fille a ses règles et une ovulation, ce n’est pas pour autant qu’ils sont prêt à avoir une relation de couple, voire même une relation sexuelle. Il peut y avoir une différence entre la maturité physiologique et la maturité psychique. Prenons par exemple les pubertés précoces : ce n’est pas parce qu’une enfant de 9 ans, qui est en CM1, a une puberté précoce, qu’on peut la marier. Je pense qu’il est important de tenir compte de cette puberté psychique, et je ne pense pas que l’on soit prêt à une relation sexuelle uniquement parce qu’on a une éjaculation ou des règles.
Cécile Miele, psychologue et sexologue au Centre Ressources pour Intervenants auprès d’Auteurs de Violences Sexuelles (CRIAVS) Auvergne et au CHU de Clermont-Ferrand :
La meilleure indication, c’est le ressenti : « Est-ce que je me sens prêt ou non à avoir un rapport sexuel ? » Et ce ressenti, parfois même il est biaisé, parce qu’en effet, il peut être influencé par la pression sociale.
Si tout le monde le fait…
Effectivement. Et c’est toute la difficulté du conformisme par rapport à la pression sociale.
L’intégralité de chacun de ces entretiens est disponible gratuitement sur notre site internet et sur notre chaîne YouTube.