Les adolescents consommateurs d’images pédophiles
Magali Teillard Dirat, psychologue clinicienne au Centre Ressources pour Intervenants auprès d’Auteurs de Violences Sexuelles (CRIAVS) Languedoc-Roussillon et au CHRU de Montpellier :
On a des ados qui recherchent du porno, mais avec des jeunes de leur âge.
Ce qui paraît, quelque part, logique…
Ce n’est pas fou. Mais c’est ballot, parce que c’est illégal et c’est du pédoporno. Mais pour eux, au départ, il n’y a pas de fantasme pédophile. Ils ne sont pas pédophiles, ils ne sont pas attirés par les enfants. Ils sont attirés par les jeunes de leur âge. Ce qui se passe, pour ces ados qui rentrent dans le porno par cette porte-là, c’est qu’ils restent fixés à cette image-là. C’était tellement excitant, cette première image qu’ils ont vue, qu’ils vont toujours rechercher cette première excitation, qu’ils ont pu ressentir. Sauf, qu’ils ne la retrouveront jamais et qu’ils sont dans une recherche qui ne s’arrêtera pas. Ce qu’il faut savoir pour nos consommateurs de pédopornographie, c’est qu’au départ, il y a une image qui plaît, qui est très excitante, et ensuite il y a une sorte de mécanisme de recherche qui se met en place, et ils vont être dans quelque chose de très addictif, du collectionneur. Ce sont des milliers d’images, qui sont téléchargées. C’est une accumulation, une collection. Sachant, qu’en plus, cette collection les rassure, mais ils ne vont pas forcément aller la revoir. Ça le rassure qu’elles soient là, mais il n’y retourne pas. Il va toujours chercher une nouvelle image, parce qu’il n’est jamais satisfait. Et c’est ce qui fait la recherche, ce qui fait la collection, et ce qui fait qu’il peut passer des heures – la nuit en général – à télécharger. Ça peut durer toute une nuit. Ce qui va générer une première souffrance, parce qu’il voit bien que c’est décalé par rapport à la société : il va être fatigué, si, le lendemain, il doit travailler… Ça ne va pas être adapté non-plus au niveau familial, s’ils ont une famille, parce qu’ils vont être obligés de se cacher, ils ne peuvent pas le faire devant tout le monde, il faut faire ça la nuit. Et puis il faut effacer à chaque fois l’historique. On finit toujours par se faire prendre dans cette histoire-là. Mais, malgré tout, ils essaient de mettre en place ce genre de choses…
Il y a une frustration constante ? C’est-à-dire, qu’il en faut toujours plus ? Il n’y a jamais satisfaction ?
C’est ça, le désir n’est jamais atteint. Ils courent derrière une chimère, cette première excitation. Il n’y a pas le deuil de cette première excitation, de ce premier plaisir, un peu comme le premier amour, que vous pouvez avoir à l’adolescence, où vous dites « C’était l’adolescence, je l’ai compris, et maintenant, j’évolue, j’ai d’autres amours, c’est différent ». Eux, restent figés. Il y a vraiment une fixation sur ce premier plaisir, cette première excitation, cette entrée dans la sexualité.
L’intégralité de chacun de ces entretiens est disponible gratuitement sur notre site internet et sur notre chaîne YouTube.