Sébastien Brochot, fondateur du projet de prévention PedoHelp®

Initiateur du projet, Sébastien Brochot est directeur artistique, réalisateur et auteur de nombreux ouvrages. Il crée les contenus diffusés sur la plateforme PedoHelp® avec les conseils du Comité d’éthique.

Qu’est-ce que PedoHelp® ?

PedoHelp® est un projet qui a pour objet d’offrir gratuitement et dans un maximum de langues des informations pertinentes sur la pédophilie et l’abus sexuel des enfants. Ces informations sont destinées aux pédophiles, aux parents, aux thérapeutes, aux enfants, aux adolescents, aux professionnels du monde de l’enfance, aux journalistes et au grand public. Ce projet combat toute forme d’exploitation des enfants ou de leur image, et vise à prévenir toute forme d’abus sexuel commis sur les enfants. L’objectif de ce projet est de prévenir plutôt que de guérir. Si chacun est capable de comprendre le fonctionnement de ceux qui sont susceptibles d’agresser sexuellement les enfants, nous serons alors tous beaucoup plus à même de repérer les situations à risque et de protéger les enfants avant qu’ils ne deviennent des victimes… ou des agresseurs ! Ce projet est donc destiné à tous ceux qui souhaitent protéger les enfants des agressions sexuelles.

Comment est-ce qu’aider les pédophiles peut protéger les enfants ?

Plus vous stigmatisez quelqu’un en le rejetant et en le montrant du doigt, plus vous l’incitez à s’enfermer, à se cloitrer dans le silence, la honte et l’auto-destruction… et c’est le meilleur moyen de créer les conditions du passage à l’acte. Il faut au contraire tendre la main aux personnes qui ressentent de l’attirance pour les enfants, leur expliquer qu’ils n’ont pas choisi leurs fantasmes, qu’ils n’en sont pas responsables, qu’ils ont besoin d’écoute, et parfois d’aide et d’accompagnement. Ce n’est pas une honte d’être attiré par les enfants, c’est une douleur. Mais ce n’est pas toujours une fatalité. Il suffit souvent d’une écoute et d’un accompagnement pour comprendre, avancer et dépasser ces pulsions.

Comment gérer l’accompagnement des pédophiles ?

PedoHelp® est une plateforme d’information et se limite à cela. Sur le site www.pedo.help, les personnes qui ressentent des pulsions pédophiles sont invitées à se référer à une liste de coordonnées d’experts (centres de soin, associations…) qui se chargeront de l’accompagnement.

Pourquoi s’occuper des pédophiles alors qu’il y a encore tant de victimes qui ont besoin d’aide ?

Il y a vingt ans, la priorité absolue était la prise en charge des victimes. Cela a pris du temps, mais aujourd’hui on peut dire qu’enfin des structures existent et que le système mis en place est capable de prendre en charge et d’accompagner les enfants victimes d’abus sexuels. Ces structures et ces systèmes sont perfectibles, certes, mais ils ont le mérite d’exister et d’être souvent efficaces.
Il est temps de passer à la vitesse supérieure, en s’occupant du problème à la source, avant que le mal ne soit fait, avant qu’il n’y ait de victimes. Il est temps de faire de la prévention, de l’information et de la sensibilisation.

Pourquoi ne pas avoir lancé ce projet au sein d’une institution existante ?

Les institutions, publiques ou privées, ne peuvent pas travailler sur la prévention des abus sexuels sur les enfants, car le sujet est encore trop tabou. Il y aura toujours un supérieur hiérarchique pour dire « c’est trop tôt, les gens ne sont pas prêts à entendre cela » en craignant pour leurs financements ou leur image. Avec PedoHelp®, je n’ai de compte à rendre qu’à ma propre éthique, je peux avancer à mon rythme sans attendre l’aval d’une quelconque autorité. Ma seule obligation est morale. N’étant ni thérapeute ni un professionnel du monde de l’enfance, pour apporter une expertise et une légitimité au projet PedoHelp®, j’ai réuni autour de moi un comité d’éthique composé d’experts. Ils m’accompagnent et me conseillent.

Quels sont les contenus déjà créés et où les trouver ?

Le site www.pedo.help est déjà en ligne et il est intégralement disponible en français et en anglais. On y trouve de nombreuses informations sur la pédophilie, un guide destiné aux parents ainsi qu’un guide destiné aux thérapeutes qui souhaitent avoir des informations sur l’accompagnement thérapeutique des personnes qui ressentent de l’attirance pour les enfants.
De nombreuses vidéos thématiques sont également en ligne sur notre chaîne YouTube : des experts (psychiatre, psychanalyste, gendarme, sociologue, historien, juriste…) répondent aux très nombreuses questions que l’on peut se poser sur différents sujets : sexualité des adultes, sexualité des enfants, pornographie, hypersexualisation, Histoire, Justice… Ces vidéos sont toutes sous-titrées en français, pour une accessibilité élargie, et elles seront petit à petit sous-titrées dans d’autres langues, avec l’aide de traducteurs bénévoles.

Avez-vous également prévu des outils ou des campagnes de sensibilisation destinés aux enfants ?

Oui, le premier outil est déjà en ligne. Il s’agit d’une histoire illustrée incitant à briser le silence. Elle est destinée aux préados et disponible sur www.nonono.help.

Quel est votre parcours ?

Je suis parisien, mais j’ai grandi à Chambéry, en Savoie. D’abord attiré par le théâtre, je suis monté sur les planches à l’âge de dix ans et j’y suis resté pendant quinze ans. Je suis arrivé à Paris en 2001 pour intégrer l’école de théâtre Claude Mathieu et devenir comédien. En 2005, j’ai créé une web-tv, lancé en 2007 un collectif qui organisait des happenings et des flashmobs, puis je me suis tourné vers la réalisation. J’ai réalisé une série documentaire sur la création artistique en 2010, un film de réflexion sur le temps qui passe en 2012, puis j’ai fondé l’agence créative this is it® en 2014. Comme vous le voyez, je suis un créatif, et rien ne me destinait à m’engager sur le terrain de la prévention des abus sexuels sur les enfants !

Alors, pourquoi lancer ce projet ?

Je comprends que l’on puisse être surpris de voir un directeur artistique se lancer sur un sujet aussi délicat. Mais si je lance ce projet, c’est parce que personne d’autre ne l’a fait jusque là et que ça me semble être une nécessité absolue ! C’est une façon de remplir mon devoir de citoyen en mettant un peu de mon énergie et de mes capacités au service d’un projet de société.
Ce projet est gratuit et j’ai décidé de ne pas me rémunérer tant que cela me sera pratiquement possible (malheureusement je ne suis pas rentier, et j’ai besoin de gagner ma vie !)
Tant que j’aurai du temps et de l’énergie pour travailler en parallèle sur des projets rémunérés, je continuerai à m’investir dans des projets de société comme celui-ci. J’ai déjà travaillé à la prévention de l’antisémitisme, ou des incivilités. M’investir aujourd’hui sur la protection de l’enfance me semblait la continuité logique de mon engagement.

Septembre 2016
Photographie de Olivier Allard